Ceci est la copie d'un acte trouvé dans un registre paroissial français.
Ce qui suit en est la transcription la plus fidèle possible, bien que j'en aie rectifié l'orthographe et la ponctuation afin de le rendre lisible en français moderne, sans toutefois en changer la syntaxe.
"Le 7 janvier 1761, par moi curé, soussigné, a été inhumé, au cimetière du lieu, le corps d'un garçon mort la veille, âgé de 8 mois et demi, chez Marie Madeleine Lalleman, femme de Charles Nardaux, manouvrier de cette paroisse, sa nourrice, fils de Jean Baptiste Guillon, commis chez l'entrepreneur de la ville, et de Nicolle Le Blant, demeurant à Paris, faubourg et paroisse Saint Laurent. Le nom de baptême de l'enfant n'est pas exprimé à cause que la nourrice a perdu le billet de renvoi et n'a pu le dire. Elle et Nicolas Flamicourt, manouvrier de la paroisse, ont assisté à l'enterrement et ont déclaré ne savoir signer, de ce, interpelés le jour et au que dessus."
Je suis restée sans voix en lisant le registre. L'enfant avait 8 mois et demi, il était donc chez sa nourrice depuis un moment, car la coutume pour les enfants qu'on n'élevait pas soi-même était de les faire nourrir à partir de leur deuxième semaine, et la nourrice ne connaissait pas son prénom !
Je veux bien comprendre qu'à cette époque là, on était habitué à la mort des enfants et qu'on ne s'y attachait pas trop, mais juste deux questions, comment le désignait-elle parmi les autres ? Et comment faisait-elle avec ses propres enfants ?
En parcourant le registre sur quelques années, on constate qu'elle n'avait pas que cet enfant là en nourrice, mais aussi André, enfant de l'hôpital des enfants trouvés de Paris qui avait deux mois. André est mort en 1763, âgé de 31 mois. Il y en avait peut-être d'autres, restés vivants, le registre ne mentionne que de ceux qui ont été inhumés.
Quelques semaines après la disparition du petit Guillon, Marie Madeleine Lalleman a pris en pension un autre enfant de l'hôpital des enfants trouvés de Paris, Noël, âgé de quelques jours. Il mourra, âgé de 14 mois et demi en avril 1762.
On mesure le chemin parcouru par contraste avec l'avalanche de biens sous laquelle croulent aujourd'hui les enfants et la sur-protection pathologique dont ils font l'objet. C'est tout juste s'ils ne vont pas à l'école avec une balise GPS dans leur poche.
N'y a t-il pas un juste milieu à trouver entre l'indifférence et l'adoration ?
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