samedi 28 mars 2009
Beaumont le Roger, le prieuré.
Je dédie cet article à mon petit pote David, 7 ans, qui s'intéresse à l'histoire de sa ville, Beaumont le Roger.
Cette gravure représente les contreforts du prieuré de la Sainte Trinité, construit par Roger de Beaumont qui voulait fonder une collégiale près de son château.
Le terrain était fort pentu et peu propice à l'implantation d'une abbaye et de logements pour les religieux.
Qu'importe, Roger voulait son abbaye là. Elle fut implantée en rognant sur le mont avec cette sublime entrée voûtée qui subsiste encore, avec quatre minarets adhérant à l'église par la gauche, le terrain étant soutenu par d'énormes murailles, elles même étançonnées par de forts piliers massifs en pierre de quarante trois pieds de hauteur.
L'inauguration était fixée au début de l'an 1087, mais la mort de Guillaume le Conquérant, qui devait assister à la cérémonie de la dédicace fit reculer celle-ci.
Roger de Beaumont dota richement la collégiale. Les témoins de l'acte furent Robert Courte-Heuse, fils de Guillaume le Conquérant, Robert d'Harcourt, Roger de Thibouville, Thierry de Launay, Ranulphe de Bigars et autres seigneurs de la contrée.
Malgré cela, Roger de Beaumont se retira à l'abbaye des Préaux, comme l'avait fit son père Onfroy de Vieilles et y mourut en 1094, âgé de plus de quatre-vingts ans. Son fils Guillaume était abbé du Bec.
Le nom de Beaumont le Roger était alors célèbre dans toute l'Europe ainsi que celui du Bec, tout proche, dont l'abbaye était fréquentée par les plus grands princes qui venaient y étudier les sciences et les lettres.
En 1118, Robert de Meulan, fils aîné de Roger de Beaumont, fonda à l'orée de la forêt le Prieuré de Grammont, dont il ne reste aujourd'hui que quelques ruines.
En 1135, Raoul de Grosley, chanoine de l'abbaye de la Sainte Trinité, donna à la collégiale l'église Saint Pierre de la Huanière.
En 1142, les chanoines de la collégiale furent remplacés par des moines et la Sainte Trinité devint prieuré dépendant de l'Abbaye du Bec. La donation fut approuvée par une bulle du pape Innocent II.
Le prieuré de la sainte Trinité continuait de recevoir des dons, des rentes et des terres. La liste des donations est interminable. Louis IX passa par Beaumont en 1258 et afferma aux religieux du Prieuré les vignes sises près du château.
L'archevêque, Eudes Rigaux, visitant le Prieuré le 24 avril de cette même année, y trouva cinq moines qui mangeaient de la viande deux fois par semaine. Il leur ordonna de s'en abstenir. Les moine jouissaient alors de deux mille livres de rentes et de provisions en quantité suffisantes pour tenir jusqu'à la récolte suivante.
Les moines de Beaumont et du Bec étaient attachés à leurs droits et étaient en procès avec les paroisses au sujet de dîmes et de redevances.
En 1307, Philippe le Bel accorda aux religieux du Bec et de Beaumont le privilège de relever directement de la couronne, de transporter, d'acheter et de vendre dans tous le royaume des marchandises exemptes de tous droits.
En 1790, la révolution passa par là, et le prieuré en souffrit gravement. Les moines disparurent. Ce sont des commerçants de Rouen qui apportèrent des pierres provenant du château du président du parlement de Rouen pour le consolider et retirent les moellons qui obturaient les croisées. A cette époque, une source jaillissait aux pieds des remparts.
En 1847, les bâtiments furent adjugés à un marchand de matériaux qui démantela l'édifice sans arrières pensées, jetant aux décombres les dépouilles des moines conservées dans les linceuls de cuir tannés et cousus.
Un membre de l'Institut, M.Lenormand, dès qu'il en fut informé, arrêta la destruction malheureusement très avancée en rachetant ce qui restait au nom de la Société des Antiquaires.
L'église est en ruines, seules restaient intactes les murailles et le couloir d'accès. Malheureusement, une partie de ces murailles fut démolie, malgré de vives protestations, lorsque la direction de l'équipement décida d'élargir le chemin pour faire la route qui mène à Brionne.
Il ne reste plus du glorieux prieuré de la Sainte Trinité voulu par Roger de Beaumont que ces quelques ruines qui sont aujourd'hui une promenade publique.
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Guillaume le conquérant ? Celui qui a traversé la Manche ?
RépondreSupprimerOui, exactement.
RépondreSupprimerBeaumont le Roger a une histoire très riche. Je vais en parler dans ce défouloir.
Par exemple, je vis sur les terres de Robert d'Artois, comte de Beaumont, cousin du roi de France Philippe le Bel, celui-là même qui a révélé l'adultère de la reine et déclenché la guerre de cent ans. Ce n'est pas rien.
Et qui est, éclaire-moi si je me trompe, à l'origine de la conversion de l'Angleterre au protestantisme ?
RépondreSupprimerEuh, il me semble que c'est plutôt Henri VIII.
RépondreSupprimerOui, ça me revient.
RépondreSupprimerMais il y a t-il un lien entre Guillaume et Henry, ou ce sont des époques différentes ?
Désolé, mais moi j'ai étudié l'histoire de la Suisse, pas celle de la France.
En plus, là, c'est celle de l'Angleterre, c'est très vieux dans mon souvenir.
RépondreSupprimerJe rentre juste, j'ai mangé du pain d'épice aux orties. Super bon.
Euh... Y'a quelques confusions spatio-temporelles, si vous permettez que j'intervienne.
RépondreSupprimerGuillaume le Conquérant a «envahi» la Grande Bretagne en 1066. J'ai cependant hâte d'en lire davantage sur Beaumont-le-Roger. Ça m'intéresse.
Quant à Philippe IV le Bel, il régna de 1285 à 1314; sa succession fut un peu difficile, puisqu'aucun de ses fils ne laissa d'héritier mâle, terminant la lignée directe des Capétiens. C'est un neveu, Philippe IV de Valois (Fils de Charles, frère de Philippe le Bel) qui prit le trône en 1328 à l'instigation des barons. Cependant, par la fille de Philippe le Bel, Édouard III d'Angleterre prétendit avoir droit au trône de France, ce qui déclencha la Guerre de Cent-Ans en 1337 lorsque Philippe de Valois prétendit envahir les terres soumises au roi d'Angleterre en Guyenne et en Flandre.
C'est bien compliqué.
Quant à Henry VIII, celui qui fonda l'anglicanisme (et non le protestantisme, même si les deux sont contemporains) il régna en Angleterre de 1509 à 1547.
Merci,Doreus, pour ce luxe de détails.
RépondreSupprimerSauf erreur de ma part, l'anglicanisme est un espèce de mix entre protestantisme et catholicisme.
Il me semble que Henri VIII voulait divorcer. L'église s'y opposant, il a créé une autre religion.
RépondreSupprimerJe continue mon exposé.
Oui, continue ton exposé, krn. Nous sommes dans l'expectative.
RépondreSupprimerC'est très gentil, Momo, mais lorsque je suis partie dans l'histoire, il est difficile de m'arrêter.
RépondreSupprimerJe suis un rat de bibliothèques et je hante périodiquement les services d'archives.
Autant dire que je dois me retenir pour rester dans mon sujet et strictement dans celui-ci.
J'ignorais que tu t'intéressais à l'histoire à ce point.
RépondreSupprimerMais point trop n'en faut. Je dois me montrer raisonnable. Les notices historiques sont rédigées en tout petits caractères et je pleure de les déchiffrer pour en faire ressortir l'essentiel.
RépondreSupprimerJ'ai notamment renoncé à copier la liste des donations, je me suis bornée à en parler.
Mes yeux me commandent de me reposer.
Bonne nuit.
Tu vas me trouver culotté, mais j'ai l'impression que l'histoire est l'une des seules disciplines qui m'apprenne qqchose. J'ai cessé de lire les journaux et les quotidiens car je me suis aperçu que je n'apprenais rien. En outre, je suis persuadé que nous savons tout, que les livres et les expériences ne sont là que pour confirmer ce que, confusément, nous savons déjà. Nous n'apprenons que ce qui est déjà en nous, y compris les choses les plus inattendues. La preuve, nous digérons très vite les nouvelles les plus incroyables, gageons que si demain matin, en prenant le café, nous apprenions qu'une civilisation extraterrestre est entrée en contact avec la Terre, à midi nous aurions déjà intégré et accepté la chose. C'est la preuve que cette chose était déjà en nous. Il en va à peu près de même, je crois, avec l'Histoire.
RépondreSupprimerBonne nuit, krn. Sage décision d'aller dormir.
RépondreSupprimerEtienne Deville a publié en 1912 le Cartulaire de l'église de la Sainte-Trinité de Beaumont-le-Roger. Cet ouvrage peut être consulté à la Bibliothèque de l'Institut de Recherche de l'Histoire des Textes à Paris. Malheureusement il est en accès restreint, réservé aux chercheurs, universitaires et étudiants à partir du MASTER, et ne m'est donc pas accessible.
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